Une histoire émouvante et étonnante en effet... Elle débute par la découverte sur le site du musée de Bretagne à Rennes de 2 cahiers à dessins appartenant à deux élèves de l'école communale de Bénodet et datés 1915-1916.
Le premier cahier, celui qui contient le plus de dessins est noté Le Roy. Sur un de ses dessins on peut lire Hervé Le Roy.
Acte de naissance de Hervé Le Roy, né le 16 janvier 1901 à Ty Palud, non loin de l'anse du petit moulin, et 6ème enfant de Pierre Marie et de son épouse Marie Le Breton.
Un des dessins réalisés par Hervé Le Roy
En octobre 1915, le préfet du Finistère organise une «Journée du Finistère» destinée à recueillir des fonds pour les soldats mobilisés, tuberculeux ou prisonniers. C'est l'artiste concarnois Théophile Deyrolle qui réalise cette affiche. Les autres dessins correspondent bien à ce que réclamait cette guerre dite totale, c'est à dire la mobilisation de toutes les forces, militaires, économiques, financières mais aussi "mobilisation des esprits" y compris de nos jeunes.
Couverture du second cahier à dessins, celui de Raymond Pennec, bien connu dans le quartier de Letty.
Nous avons la chance de disposer de cette photo qui représente les garçons de la communale de Bénodet en 1913. Situés au-dessus de leur maître Benjamin Monmoton, nous remarquons, Hervé Le Roy (cercle rouge) et Raymond Pennec (cercle jaune).
Dans le cahier de Raymond Pennec un seul dessin ! Il représente une remise de décoration à Alain Cosquer le 22 janvier 1916.
Un petit peu de recherches sur le site des archives départementales, dans la presse ancienne en particulier et Bingo !!!
Journal « LE FINISTERE » du 29 janvier 1916
Bénodet – Samedi 22 janvier, la médaille militaire a été remise au soldat réformé Cosquer Alain de Bénodet. La cérémonie fut simple mais très touchante. Elle eut lieu dans la cour de l’école, devant les élèves, garçons et filles, qui formaient comme une garde d’honneur au glorieux mutilé. Tête nue et dans un silence impressionnant, ils écoutèrent la belle citation à l’ordre du jour de l’armée obtenue par Cosquer, et que lut d’une vois forte et émue, M . Lagrange, Maréchal des logis de gendarmerie à Fouesnant .
Cosquer Alain, soldat à la 4° compagnie du 411° régiment d’infanterie.
" Excellent soldat qui a toujours fait preuve d’un grand courage, servant ainsi d’exemple à ses camarades. Blessé par une balle à l’œil droit le 13 septembre 1915 alors qu’il était guetteur dans la tranchée, a dû subir l’énucléation de cet œil ».
La présente citation comporte l’attribution de la croix de guerre avec palme.
Signé : Joffre
Puis la médaille militaire fut épinglée sur la poitrine de ce brave… Des larmes perlaient aux yeux de quelques élèves qui ne pouvaient maîtriser leur émotion. La cérémonie était achevée et ces enfants, si turbulents d’ordinaire, ne faisaient pas un mouvement. Brusquement et sans aucun signal, toutes les petites mains battirent en l’honneur du grand camarade qui, pâle d’émotion et l’air presque intimidé, semblait moins brave devant tous ces petits yeux que devant les balles allemandes.
Cosquer est rentré dans ses foyers depuis 2 mois. Complètement illètré, il a voulu apprendre à lire pour obtenir un poste de facteur, ces postes étant réservés aux mutilés de la guerre. Sans fausse honte, malgré ses 22 ans, il a fréquenté l’école. Aujourd’hui il sait déjà lire et écrire, et c’est avec un légitime sentiment de fierté qu’il a pu signer le procès-verbal de remise de sa médaille. Honneur à ce brave ! Souhaitons que l’Administration lui accorde le modeste poste qu’il sollicite et qu’il mérite, non seulement pour son courage militaire, mais pour le courage, plus grand encore peut-être, dont il a fait preuve en venant s’asseoir à son âge sur les bancs de l’école.
L. O. ( C’est-à-dire Louis Ogès)
Acte de naissance d'Alain Cosquer. Il est donc né à Bénodet le 17 février 1895. Ce document nous apprend également qu'il se marie le 16 octobre de l'année 1916 avec une jeune fille originaire d'Elliant, Marie Anne Hemery et qu'il décède à Quéven dans le Morbihan en 1948. Comme l'espérait Louis Ogès, Alain Cosquer devînt facteur des Postes. C'est en tout cas la profession qui lui est attribué lors de son mariage.
S'il fut bien entendu facile de transmettre le beau dessin à la famille de Raymond Pennec, nous ne sommes pas parvenus, pour le moment, à retrouver d'éventuels "héritiers" que ce soit d'Hervé Le Roy ou de Alain Cosquer.
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